dimanche 13 février 2011

[JEU] "Putain, les heals, mais arrêtez de vous toucher, sérieux !" : World of Warcraft, la cyberdépendance et toi


Cette chronique est affectueusement dédiée à Sedgewick Ier,
à ma connaissance le seul et unique gnome voleur d’Azeroth
ayant réussi à garder la tête haute et à survivre plus de
quatre secondes et demie en "tankant" par inadvertance
un boss dans la nécropole de Naxxramas.

ACTE I

Au tout début de ton périple, tu trouveras que ce jeu est assez sympa.
Au tout début de ton périple, tu trouveras que ce jeu est assez impressionnant.
Tu te promèneras dans un monde que tu percevras – après un rapide coup d’œil aux cartes alors encore brumeuses – comme gigantesque et diversifié.
Et tu auras raison : ce monde est gigantesque et diversifié.

Tu seras un nain guerrier de niveau 1, puis un humain prêtre de niveau 1... Les PnJ (personnages non-joueurs) te guideront gentiment et te proposeront des quêtes faciles, évidentes même, dans un univers cloisonné et protecteur. Tu devras décimer les trolls crins-de-givre faiblards qui traînent près de la mine, tuer quelques sangliers pas trop méchants, aller chercher de la bière... Des bêtises de ce genre.

Tu trouveras ces actions un peu idiotes, mais tu ne quitteras pas ton écran des yeux pour autant.
Deux heures plus tard, tu en seras à ton quarantième troll, à ton trente-deuxième sanglier et à ta seizième chope virtuelle.
Ton nain sera "déjà" niveau 5.
Tu seras content car Grelin Blanchebarbe t’enverra, par-delà le tunnel des Frigères, visiter Forgefer, la capitale imprenable creusée dans les montagnes de Dun Morogh.
Et tu n’en croiras pas tes yeux, la première fois que tu la verras.
Elle te fera penser aux mines de la Moria avant qu’elles ne tombent.

À ce moment-là, tu ne seras pas méfiant.
Mais s’il te plaît, méfie-toi !
Méfie-toi car tu vas "perdre" plus d’un an dans ce jeu.

Ce monde est celui de World of Warcraft. WoW pour les intimes.
WoW est un MMORPG : un jeu de rôle massivement multi-joueurs.
WoW est une franchise de Blizzard Entertainment.
WoW est payant.
WoW compte douze millions de joueurs actifs sur Terre.
WoW rapporte une petite fortune.
WoW se passe en temps réel, entièrement en ligne, dans un univers en 3D.
WoW ne dort pas.
WoW est une drogue.
WoW pourrait à lui tout seul être le sujet d’une thèse de doctorat sur la cyberdépendance.
WoW est formidable, WoW est dangereux.

Digression : mais pourquoi WoW est-il dangereux ?

Il est dangereux parce que tu auras toujours quelque chose à faire dans ce putain de monde virtuel...

Tu en auras forcément marre des quêtes répétitives. Tu fermeras de temps en temps les yeux et tu croiras alors pouvoir éteindre ton ordinateur à ce moment précis où tu sentiras la fatigue et la lassitude t’envahir. Pauvre de toi ! Car tu seras alors déjà presque à la merci des Titans d’Azeroth ! En effet, te diras-tu, pourquoi, avant d’éteindre WoW, ne ferais-tu pas une dernière petite quête vite fait ? Je vais bientôt monter d’un niveau, ce n’est qu’une question de minutes ! Oui mais voilà, la dernière quête dans WoW, c’est un peu comme le dernier verre de l’alcoolique : une promesse, un absolu que le drogué repousse sans cesse à plus tard, toujours à plus tard, à jamais à plus tard...

Pourquoi, te demanderas-tu dans la soirée, pourquoi ne partirais-tu pas avec ta pioche détacher quelques minerais que tu pourrais fondre et puis revendre ? Juste une petite heure, hein, et puis au lit ! Deux heures après, tu te rappelleras soudain que tu dois encore repasser par la capitale pour voir ton maître d’armes. Pourquoi pas demain ? Bah, c’est juste à cinq minutes d’ici : ce sera vite fait ! Et ainsi de suite.

WoW est aussi et surtout dangereux parce que tu ne seras pas le seul à y jouer.

Au plus tu évolueras dans ce jeu, au plus les autres joueurs gagneront en importance. WoW est multi-joueurs : tu n’en verras qu’une petite partie si tu restes seul dans ton coin. Alors, tu briseras la routine des quêtes solitaires et tu commenceras à participer à des instances : des donjons pour cinq joueurs ; plus tard, des raids pour 10 joueurs ; et enfin des raids pour 25 joueurs.

Les instances, ce sont ces parties du jeu où tu te retrouveras avec un groupe d’amis pour battre des monstres plus forts, que tu ne pourrais jamais battre en solo. À cinq joueurs, une instance fonctionne toujours de la même façon : un personnage joue le tank et se prend tous les coups ; un autre joue le heal et soigne l’équipée ; trois DPS font le plus de mal possible. Le tank et le heal sont très importants. Sans ces deux-là, tu ne pourras jamais finir une instance de ton niveau.

Tu ne choisis jamais la simplicité. Je te connais bien, mon vieux. Tu "monteras" d’abord un tank jusqu’au niveau 80 et tu recommenceras l’opération avec un heal. "Rien" que ces deux opérations de levelling (comme ils disent) te prendront 1347 heures de jeu (parce que tu es lent et que tu aimes flâner), 1347 heures de ta petite vie à la con. Ton nain guerrier, tu l’appelleras "Pardhotch", en souvenir du "Pardot" de l’alliance MonLeg. Ton humain prêtre, tu l’appelleras "Oldhaham" parce qu’il aura volontairement un air de ressemblance avec Will Oldham, le chanteur. Pour tous les autres, tu seras Oldy, le petit Belge de la guilde.

ACTE II

Tu seras un très mauvais tank. Un des plus mauvais de la Croisade Écarlate.
Par contre, tu seras un très bon heal. Du moins c’est ce que diront les gens de ta guilde.

C’est lié à ta personnalité dans la vraie vie : tu aimes rester loin de l’action.
Tu observeras le combat et aideras les autres joueurs en lançant tes Pénitences, tes Flash heals et tes boucliers protecteurs (tes "bubulles" dans le jargon) depuis ta "colline". Tu passeras des centaines et des centaines d’heures à ne faire que ça et tu en tireras une énorme satisfaction.

Tu t’achèteras un micro-casque pour pouvoir parler en temps réel avec tes compagnons. Pour discuter de tout et de rien, oui, mais aussi – et surtout – pour pouvoir réagir très rapidement dans une instance de haut niveau. Tu rencontreras des gens et tu comprendras, à travers certains spécimens – miroirs de toi-même – ce que c’est que de consacrer sa vie – ta vie – à un bête jeu.

Tu passeras tes soirées avec ton ami sympa et intelligent, scénariste de télévision, et son fils de 10 ans qui fait de l’équitation, qui se connecteront tous les soirs sur deux ordinateurs différents, dans deux pièces différentes de la même villa du sud de la France, se parlant (comme vous tous) par micros-casques interposés.

Tu passeras tes soirées avec ce militaire de carrière quelque peu instable, caricature presque parfaite du beauf qui a tout-vu-tout-vécu et à qui on ne l’a fait pas, hein, tantôt tendre, tantôt désagréable au possible, alcoolique depuis, dira-t-il, qu’il est revenu de Sarajevo, passant ses soirées de fin de trentenaire à chercher la tenue parfaite du combattant virtuel (quoi-Oldy-tu-portes-encore-du-T7-mais-faut-te-stuffer-mon-petit-gars !).

Tu passeras tes soirées avec son cousin, père d’un bébé en très bas âge, qui tiendra ce dernier dans ses bras tout en "tankant" un donjon avec son paladin et tu te demanderas comment il est possible d’en arriver là, techniquement mais surtout humainement parlant. En fait, tu ne seras pas loin de son cas, mais tu ne t’en rendras simplement pas compte. Car toi aussi, tu auras une charmante petite fille dont tu devras t’occuper, certains week-ends en tout cas.

Tu passeras tes soirées avec des couples qui égraineront leur temps sur ce jeu chronophage. Plus fou encore, tu vivras, en direct depuis tes écouteurs, la scène de jalousie d’un gars dont la compagne IRL (dans la vraie vie donc) sera mariée ingame (dans le jeu) à un autre joueur. Une scène de jalousie à cause d’un mariage virtuel. Mais est-ce réellement totalement virtuel ? Ce sont de vrais gens que tu rencontreras là-bas.

Chacun de ces personnages fera partie de ta vie.
Chacun de ces personnages sera un reflet de toi-même.

Et c’est à ce moment-là que tu deviendras méfiant.
Mais il sera trop tard.
Tu seras réellement en train de "perdre" un an dans ce jeu.

Mais au moins, à ce moment-là, tu t’amuseras encore.
Parce qu’après ça, tu ne t’amuseras plus.

ACTE III

Tu t’amuseras jusqu’au jour de l’arrivée des hardcore gamers dans ta guilde.
Un hardcore gamer, comme tu le sais déjà, c’est un joueur qui passe beaucoup de temps sur un  jeu, par opposition au casual, joueur occasionnel.

Sur WoW (et sur la plupart des gros MMORPG), la définition est un peu différente. Tout le monde y passe beaucoup de temps. Du coup, le type qui n’y passe "que" huit heures par jour et – surtout – qui n’optimise pas son stuff et son template à la perfection (traduction : qui est juste là pour s’amuser), est un casual.

Le casual passe sa vie sur WoW.
Le hardcore gamer passe sa vie pour WoW.

Dans un donjon ou dans un raid, en cas d’erreur de ta part et de wipe (la mort de toute l’équipe), tes amis casuals te diront : "C’est pas grave, Oldy, on va la refaire, mais en moins stressé !" ; le hardcore gamer, lui, te dira : "mais c’est pas possible, tu te touches ou quoi, le heal ? J’ai pas que ça à foutre, putain !".

Quand il te croisera dans la capitale volante de Dalaran, le casual te fera un "/salut" amical ; le hardcore gamer, lui, te dira : "va falloir optimiser ton stuff et ton template, mon gros noob ! Pourquoi que t’as mis cette gemme-là sur ton torse ? Et pourquoi que tu n’as mis que deux points dans Disciplines jumelles ?"

En fait, tu ne les remercieras jamais assez, ces hardcore gamers.
C’est grâce à eux que tu t’en sortiras, à la fin.

Car tu aurais encore pu passer beaucoup plus de temps sur ce jeu. Tu aurais pu terminer ce haut-fait super long (des milliers de quêtes à achever) pour être un Maître des Traditions. Tu aurais pu compléter ta collection de montures terrestres et volantes. Tu aurais pu faire des instances et des raids jusqu’à plus soif pour optimiser ton équipement.

Mais à ce moment-là, tu deviendras beaucoup trop méfiant.
Et il sera vraiment trop tard.
Tu auras réellement "perdu" plus d’un an dans ce jeu.

Après ça, tu recommenceras à jouer de nouveau plus souvent au badminton et surtout, plutôt que de t’enfuir dès 20h30 pour retrouver ton PC au plus vite, tu iras boire des verres avec tes amis du sport...

Avec certains succès et certains échecs.

ÉPILOGUE

Oh comme j’aimerais que cette chronique arrive – par je ne sais quel détour spatio-temporel – à tes yeux, cher Hamilton. Comme j’aimerais que tu puisses la lire en guise d’avertissement une heure avant que tu ne t’abonnes à ce putain de jeu. Mais tout cela est derrière nous désormais, n’est-ce pas ? Et puis, comme je l’ai déjà dit plus haut, je ne te connais hélas que trop bien : tu es quelqu’un de borné. Il faudra toujours que tu te fasses une idée par toi-même. L’avis des autres (même d’un toi futur) ne pèserait pas beaucoup dans la balance. C’est désespérant.

C’est d’autant plus désespérant que ce texte m’a furieusement redonné en vie de rejouer à WoW, aujourd’hui.

La nouvelle extension est sortie.
Paraît qu’ils ont entièrement refait les régions de Kalimdor et des Royaumes de l’Est.

"Suffirait" de réinstaller le jeu sur mon PC, de repayer l’abonnement mensuel et de reprendre mon prêtre là où je l’ai laissé l’an dernier, où tu l’as laissé l’an dernier, petit lâcheur, c’est-à-dire dans les bases de données de Blizzard Entertainment.

Et je me demande ce qu’est devenu mon ami Sedgewick.
Il n’est plus sur WoW désormais, ça je le sais.
J’ai son numéro de téléphone.
Son adresse e-mail.
Faudrait que je le recontacte, non ?

samedi 12 février 2011

[HUMEUR] Autre chose...


Je suis malade.
Je suis grippé.
Mon médecin un peu parano m’a prescrit du Tamiflu™/Oseltamivir™/Aaaaatchoum™.

En attendant ma mort prochaine et mon article intitulé "Testament(s)" (qu’est-ce que qu’on se marre avec Tonton Hamilton !),
En attendant ma chronique en cours de rédaction sur les "amitiés centrifuges" (tout un programme !),
En attendant le prochain texte sémillant (ou pas) de Léandra,
Voici... autre chose.

J’ai un peu de fièvre ce soir et mon nez se bouche, alors qu’il me laissait tranquille jusqu’à aujourd’hui, ce con.
Je suis fatigué.
Je n’ai pas toute ma tête.
Ce texte sera décousu ou ne sera pas !

J’écoute des trucs bizarres que je n’ai plus écoutés depuis des années.

J’entends presque Léandra soupirer : "Encore de la musique...". Attends, Léandra, ne t’en va pas ! Vous autres non plus d’ailleurs ! Cette fois-ci, les paroles sont poétiques et en français. Ce sont des chansons curieuses distillant des ambiances dadaïstes... Autre chose donc !

Et, quand le Noctambule prend la parole, il n’y a pas d’analyses.
Juste deux groupes pas assez connus qui font... autre chose.

Y a pas que Benjamin Biolay ou Bénabar dans la vie, tu sais !
Y a RIEN et le poète JULL (de Grenoble), par exemple.
Aucun rapport avec les deux premiers, cela dit.
Mais j’arrête de vous emmerder.
Leurs albums sont téléchargeables (gratuitement si vous ne voulez rien donner) ICI.



Y a pas que CAN dans la vie, y a aussi FAUST aussi (un groupe allemand avec un "chanteur" français, Jean-Hervé Péron).
"Chère chambre", voilà une chanson qui convient parfaitement à ma situation !
Mais j’arrête de vous emmerder.



C’était bien, non ?
Vous n’avez pas écouté ?
Bah, ce n'est pas grave. 

Je suis malade.
Et je retourne dans ma musique.
Cet interlude sans intérêt vous a été offert par les laboratoires Roche et Bristol Myers Squibb.

Vous avez vu ? Moubarak s'est retiré du pouvoir !

lundi 7 février 2011

[SCIENCE] L’homéopathie en tout. Retranscription de la conférence d’Hamilton L. Evenvel à l’Université de Miskatonic (Massachusetts), le 12 janvier 2011


Mes chers amis, mes chers confrères, chers étudiants, chers vieillards là-bas-au-premier-rang-qui-comblez-vos-journées-monotones-en-assistant-à-des-conférences-universitaires, c’est avec un plaisir non dissimulé que je vous retrouve en ces lieux prestigieux pour vous parler d’un sujet qui, comme souvent, a accaparé mes recherches durant la quasi-totalité de l’année académique courante. Cette fois-ci, nous traiterons de l’homéopathie appliquée à tous les domaines de l’existence.

Vous connaissez tous l’homéopathie, je suppose ? Pardon ? Oui, jeune homme ? Comment ça, "c’est la médecine par les plantes" ? (Soupir.) BON SANG, je vous avais pourtant distribué une note explicative en début de session ! C’est pas POSSIBLE, un truc pareil ! Pourquoi je passe encore mon TEMPS à écrire des notes explicatives, BORDEL ? (Le professeur Evenvel prend une chaise en bois sur l’estrade et la fracasse sur le tableau noir pour se défouler un bon coup. Car le professeur Evenvel est assez colérique, en fait ! Mais revenons à son passionnant monologue.)

Je vais devoir reprendre tout depuis le début, alors. (Grande respiration.) Le processus homéopathique utilise des essences de plantes, oui. Mais "l’allopathie", pour reprendre le terme de Friedrich Hahnemann, fondateur de l'homéopathie, s’intéresse, elle aussi, aux plantes pour... Hein ? Comment ça, "c’est quoi l’allopathie ?". C’est dans les NOTES ! Est-ce que quelqu’un peut faire SORTIR ce jeune homme, s’il vous plaît ? Merci. (De nouveau une grande respiration.)

Reprenons... Beaucoup de gens pensent que l’homéopathie est synonyme de "médecine par les plantes". Ils confondent en fait l’homéopathie avec la phytothérapie. Ils sont à côté de la plaque, les pauvres. Comme nous allons le voir, les deux grands principes de l’homéopathie sont la similitude et la dilution.

La similitude d'abord. C'est un principe un peu ridicule, quand on y réfléchit bien. Ça consiste à dire que si vous êtes malade, vous pouvez être soigné avec une substance qui produit, sur un organisme en bonne santé, les mêmes effets que la maladie ("homéo" vient du grec homoios, qui signifie "le même", "similaire"). Similia similibus curantur, disait Hahnemann. Les semblables sont guéris par les semblables... Pardon, Madame ? "Un peu comme un vaccin ?", dites-vous ? Mais... Mais... Argh... Les VACCINS, Madame, constituent une prévention et non une thérapeutique. Les vaccins permettent au corps humain de stimuler les défenses immunitaires contre un agent infectieux à venir. Ça n'a rien à voir. Non, Madame, ça n'a RIEN à voir. En plus, dans un vaccin, il y a un principe actif, alors que dans une solution homéopathique, il n'y a rien. Oui, oui, RIEN. J'y arrive, si vous voulez bien me laisser continuer ma conférence. Merci.

La dilution (ou dynamisation) ensuite. Le problème avec ces produits qui ont les mêmes effets que la maladie, c'est qu'ils sont toxiques. Hé oui. Du coup, il faut les diluer. Il faut tellement les diluer qu'il ne reste statistiquement plus une seule molécule du produit dans la solution après la dilution. La dilution fonctionne de cette manière : vous prenez une goutte d'un produit donné (la  solution-mère) et vous la mélangez à 99 gouttes de solvant (de l'eau, très souvent). Vous obtenez un dosage de 1CH ("centésimale hahnemannienne"). Puis, à partir du premier mélange, vous recommencez : une goutte de ce mélange pour 99 gouttes de solvant (2CH). On peut aller ainsi couramment jusqu'à 30CH, soit l'équivalent d'environ un millilitre de solution dilué dans un cube d'eau d'un milliard de milliards de mètres de côté.

Ça, tout le monde le sait. Ou devrait le savoir.

Venons-en donc, après ces quelques explications, au cœur de notre sujet : l’homéopathie en tout. Le concept est le suivant : vu que des solutions homéopathiques, sans aucun principe actif donc, sont quand même curieusement achetées par des patients qui croient dur comme fer à leur efficacité, pourquoi ne pas appliquer l’homéopathie à d’autres branches de l’activité humaine ? Et j’irai encore plus loin, Mesdames-z-et-Messieurs : pourquoi ne pas l’appliquer à tous les domaines de l’existence ? Quelques exemples ne sont pas de trop pour vous montrer l’essence même de mon projet mégalomane.

Politique. Démarche : vous prenez une théorie ou un programme politique fort (comprenez : de refonte globale de la société) et vous lui appliquez le principe de dynamisation. Pas besoin d'aller jusqu'à 30CH. Prenez par exemple le concept de lutte des classes ou de révolution prolétarienne que l’on retrouve de manière très marquée chez les socialistes révolutionnaires du XIXe siècle. Vous diluez tout ça dans beaucoup de solvant, jusqu’à au moins 3CH, soit l’équivalent d’une goutte de marxisme pur et dur pour 999.999 gouttes de grand n’importe quoi. Vous obtenez dès lors un "socialisme homéopathique" très mou aligné grosso modo sur les théories néolibérales de flexibilité de la main-d’œuvre et de privatisation des services publics. Et ça fonctionne aussi avec les hommes politiques ! Jean Jaurès dilué à 6CH, ça donne Elio Di Rupo. Pierre-Joseph Proudhon dynamisé (ou dynamité ?) à 12CH, ça donne Manuel Valls. Paul Lafargue à 40CH, ça donne Milton Friedman ou Margareth Thatcher. Me situant très à gauche sur l’échiquier politique, je vous avouerai que ce genre de dilution des valeurs ne me plaît guère, mais là n’est pas la question.

Religion. Même démarche : vous prenez une religion très hardcore, si vous voyez ce que je veux dire. Du genre : un culte dont les membres préfèrent se faire crucifier, empaler, rouer, percer de flèches, brûler vifs, écarteler ou écrabouiller par une meule plutôt que de renier leur dieu. Ou bien une discipline dont les fidèles doivent rester assis sur une colonne pendant des semaines entières, sans rien dire, sans rien faire : juste méditer, manger, boire et faire pipi/caca de temps en temps (mais comment faisaient-ils ?). Dilué à 1CH, cette même religion deviendra du pseudo-bouddhisme New Age inoffensif et un peu nunuche, si vous me permettez l'expression ; à 2CH, du déisme ; à 3CH, de l’agnosticisme ; à 4CH, de l’athéisme... À 5CH, il ne restera tellement plus de religion que même le baron d'Holbach himself en serait totalement retourné. Personnellement, je me situe sur le plan religieux entre le 4CH et le 5CH et je ne m'en porte pas trop mal, merci.

Alcoolisme. Ici, nous appliquerons à la fois le principe de similitude et de dynamisation. Similitude : pour guérir l’alcoolisme, nous allons utiliser un produit qui a sur un organisme sain les mêmes effets que l’alcool sur un alcoolique. Ce produit miraculeux, c’est... l’alcool. Bah oui, l’alcool... Si une personne sobre boit beaucoup d’alcool, son corps a priori sain subira les effets de l’alcoolisme. C’est d’une logique implacable. Le problème, c’est qu’on ne peut guérir l’alcool par l’alcool pur. Du coup, il faut diluer ! Un alcoolique devra donc prendre, pour se soigner, une dose homéopathique d’alcool : de l’alcool dilué à 9CH, soit l’équivalent d’environ un mètre cube de calvados dans l’entièreté des océans de la Terre, me semble un bon compromis. Dès lors, ce que l’alcoolique en cure de désintoxication homéopathique boira sera seulement de l’eau, en réalité. Pardon Monsieur ? "Pourquoi ne pas lui donner directement de l’eau, alors ?". C’est une très bonne question. La réponse est très simple : l’eau est bon marché, alors que le produit homéopathique à base d’absence d'alcool que nous facturerons à l'alcoolo de base sera, lui, beaucoup plus cher. L’homéopathie est une fabuleuse théorie pour se faire un max de blé à partir de rien.

Sexe. Durant ces trois dernières années, j'ai testé pour vous, et seulement à des fins d'expérimentation (je sers la science et c'est ma joie), la relation sexuelle à dose homéopathique. Conclusion : ça n'a aucun intérêt et c'est très ennuyant. Le sexe dynamisé à 1CH seulement est déjà très peu convainquant. À 7CH (l'équivalent d'un orgasme dans le volume total du Lac Léman), on devient un peu frustré. À 30CH  (un instant de plaisir dans l'ensemble de l'Univers connu), on ne ressent plus rien du tout. Conclusion de cette (trop) longue expérience : en matière sexuelle, l'allopathie reste la règle absolue. Quant au principe homéopathique selon lequel "les semblables sont guéris par les semblables", euh... Désolé, étant hétéro et non homéo, je n'ai pas testé.

Tueurs en série. Les psychopathes et autres tueurs en série pourraient être convertis, pour le bien de tous, à l'homéopathie. En effet, si ces assassins pouvaient être convaincus qu'il est plus sage (et plus sympa pour la victime, aussi, soit dit en passant) de découper une jambe dynamisée à 10CH (soit l'équivalent d'un micron de racine de poil de jambe) plutôt qu'à 0CH (la jambe entière), le Monde ne s'en porterait certainement pas plus mal.

Lunettes. Imaginez le bénéfice que pourrait tirer un opticien ne vendant QUE des lunettes ou des lentilles homéopathiques. La technique de production de tels produits se bornerait simplement à la fabrication de verres à la dose homéopathique standard, soit 30CH, soit encore une unité de verre pour 10³³ gouttes de néant. Bon, d'accord, le presbyte homéopathe se prendrait constamment des portes dans la figure et le myope homéopathe aurait du mal à suivre un film au cinéma, mais quelle économie de matériaux cela constituerait...

Scoutisme. Je hais les scouts, surtout quand ils sont en bande organisée (ce qui est très souvent le cas, vu qu'ils sont scouts, justement) et qu'ils gueulent dans les trains. Dès lors, j'ai créé, au sein de mon module de recherche, un groupe de travail spécifique dont le but est de plancher sur une solution homéopathique à ce que j'ai pris l'habitude d'appeler le plus sérieusement du monde le "problème scout". L'objectif est d'arriver, sur les deux premières années du programme, à une dilution à 2CH des scouts dans les trains (1 scout pour 9999 navetteurs "normaux" qui n'ont rien demandé à personne, si ce n'est de pouvoir dormir ou lire leur journal en paix), pour à terme arriver à une dynamisation de 5CH, soit un scout pour environ 10 milliards d'habitants, soit encore grosso modo un demi-scout pour la totalité de la population terrestre actuelle. Une fois le problème scout résolu, nous plancherons sur les détraqués qui dérangent les gens dans les transports en commun (voire dans leur appartement) en écoutant de la musique (forcément) débile, et enfin sur les beaufs (gros travail pour notre groupe de recherche car il y a encore plus de beaufs que de scouts ou d'anti-mélomanes).

Homéopathie. Enfin, pour terminer cette conférence par une lueur d'espoir, nous proposons au final d'appliquer la dilution homéopathique à l'homéopathie elle-même. À savoir : prendre toute cette pseudo-science à deux balles faite de néant absolu et la dynamiser à 30CH, 40CH, voir même 256CH, histoire que même s'il existe des univers parallèles au nôtre, l'homéopathie ne puisse jamais en faire partie.

Je vous remercie.

(Applaudissement d'une partie de l'auditoire.)
(Huées de l'autre partie.)

Ah oui, j'oubliais : je n'en ai rien à cirer que vous soyez d'accord ou pas.

Cela dit, si vous avez d'autres idées d'homéopathie appliquée à un domaine de l'existence, n'hésitez néanmoins pas à me les communiquer... Je me ferai un plaisir de les étudier et de les citer dans mes prochains travaux !

(Merci à Léandra Courbet pour certaines ébauches d'idées.)

mercredi 2 février 2011

[HUMEUR] "Pauvre Belgique !", Baudelaire et les beaufs


Je ne vous parlerai pas de politique, ne vous inquiétez pas.
Le roi blanc me hurle dans l’oreille gauche (il est un peu sourd et parle donc très fort, aïe !) que tout est politique.
Quant au roi noir, il se morfond à l’autre bout de l’échiquier et s’en fout royalement (c’est doublement le cas de le dire).
Mais peu importe : les rois sont gâteux de toute façon.
Et je ne vous parlerai pas de politique.

Furetant quotidiennement sur les forums des journaux, mes yeux tombent parfois sur une expression, un tic de langage qui m’amuse beaucoup (faut dire qu’il m’en faut peu pour m’amuser)... Le tic consiste à ajouter au bout de chaque affirmation péremptoire : "Pauvre Belgique !".

La chose fonctionne en outre très bien avec n’importe quelle autre région du Globe, et en toutes circonstances (!) :
"Plus de deux cents jours sans gouvernement ! Mais que font nos politiques ? Pauvre Belgique !"
"La sidérurgie n’est plus ce qu’elle était ! Pauvre Wallonie !"
"Encore un évadé à la prison de Jamioulx. Pauvre Belgique ! Pauvre Wallonie !"
"Je me suis cassé une dent sur une galette bretonne. Pauvre Bretagne !"
Parfois, les auteurs, non contents de leur triste forfait, en rajoutent encore une couche avec le glorieux et typique "Mais où va-t-on ?" :
"Plus de deux cents jours sans gouvernement ! Mais que font nos politiques ? Pauvre Belgique ! Mais où va-t-on ?"
"La sidérurgie n’est plus ce qu’elle était ! Pauvre Wallonie ! Mais où va-t-on ?"
"Encore un évadé à la prison de Jamioulx. Pauvre Belgique ! Pauvre Wallonie ! Mais où va-t-on ?"
"Je me suis cassé une dent sur une galette bretonne. Pauvre Bretagne ! Mais où va-t-on ?"
(Vous avez vu ? J’ai trouvé un moyen pas cher pour augmenter la taille de mes articles !) 
(Je suis fort, très fort.)
(Malheureusement pour moi, je ne suis pas journaliste et je ne suis pas payé au nombre de caractères publiés.)
(En fait, je ne suis même pas payé du tout.)
(Mais qu’est-ce que je fous là, moi ?)
(Passons...)

Bon, sachez quand même que la plupart du temps, ce n'est pas écrit comme ça. Pour faire bonne figure et ne pas passer pour un intello, le commentateur doit mettre beaucoup de ponctuation, n'importe comment, et faire quelques fautes d'orthographes :

"+ de 200 jours sans gouvernemnt !!!?! Mais, que font nos politiques?.... pauvre Belgique mais ou va-t'on????"
Charles Baudelaire déjà, il y a presque 150 ans, nous pondait un pamphlet limite haineux (hé ouais, petit salopiaud va !) intitulé "Pauvre Belgique !". Vu qu’il écrivait quand même un tout petit mieux que tous ces zélés commentateurs de forums, il ne terminait pas ses phrases par "Pauvre Belgique ! Mais où va-t-on ?". S’il l’avait fait, ça aurait donné un truc du genre :
"La France a l’air barbare, vue de près. Mais allez en Belgique et vous deviendrez moins sévère pour votre pays. Pauvre Belgique ! Mais où va-t-on ?"
"On n’a jamais connu de race si baroque que ces Belges. Pauvre Belgique ! Mais où va-t-on ?"
"[J’ai vu des Belges qui], dans l’horreur de la fange et du vomissement, et gorgés jusqu’aux dents de genièvre et de bières, aboyaient à la Lune, assis sur leurs derrières. Pauvre Belgique ! Mais où va-t-on ?"
Le dernier extrait a été écrit par l’ami Charles spécialement pour Léandra et moi ! Quel visionnaire, ce Charlie !

"Pauvre Belgique"...

Hé bien, tout compte fait, je trouve que ça ne sonne pas trop mal.
"Pauvre Belgique !", c’est beau.
Que dis-je "c’est beau" ? C’est  su-bli-me ! La formule transforme le ridicule et vulgaire pamphlet en une œuvre immortelle.
J’ai ainsi fini par me convaincre du bien-fondé de l’expression.
"Pauvre Belgique !", "Mais où va-t-on ?"... Ces phrases passe-partout sont gé-nia-les.
Et j’ai donc décidé de les adopter et de les utiliser à chaque fois que c’était possible.
Pauvre Belgique ! Mais où va-t-on ?

En fait, au départ, je devais vous pondre un sujet sur le crépuscule d’amitiés de jeunesse à partir d’une chanson d’Okkervil River, mais ça prend plus de temps que prévu. Du coup, je comble avec un sujet inintéressant au possible. Pauvre Belgique ! Mais où va-t-on ?

Après seulement quelques semaines, ce blog devient donc déjà du grand n’importe quoi. Pauvre Belgique ! Mais où va-t-on ?

Enfin, je suppose que ça fera au moins rire Léandra (ou pas)... Pauvre Belgique ! Mais où va-t-on ?

La muette de Portici joua apparemment un rôle prépondérant dans le déroulement de la Révolution belge de 1830. Pauvre Belgique ! Mais où va-t-on ?

Le tigre de Sumatra est en voie d’extinction (seulement 500 individus environs seraient ainsi encore présents à l’état sauvage sur l’île). Pauvre Indonésie ! Mais où va-t-on ?

La théorie des cordes repose sur l’idée que les briques fondamentales de l'univers ne seraient pas des particules ponctuelles mais des cordelettes sous tension qui vibrent à la manière d’un élastique. Pauvre Univers ! Mais où va-t-on ?

Fatigué, moi.
Mal dormi cette nuit. Réveillé avec mal au ventre. Grmbl...

Pauvre Belgique.

Mais où va-t-on ?


[HUMEUR] Les Hommes de Ma Vie


Ah, ça y est, il est lancé, Hamilton. Il ne me laisse plus en placer une…

A moins que… Une chanson ? Celle-là est de circonstance…

Et ce n'est pas que ton discours
Ne semble pas intéressant

Tu parles peut-être même d'amour

Ouais mais tu parles

Tu parles tout le temps


Je suis de mauvaise foi, là. En fait, je suis bien contente qu'il ait enfin lancé son blog : depuis le temps qu'il en parlait…

Allez, il peut bien écrire sur des musiques-que-personne-ne-connaît ou sur des trucs-abscons-de-garçons-qui-ont-grandi-le-nez-plongé-dans-des-bouquins-de-science-fiction-avec-des couvertures-hideuses-et-où-les-personnages-portent-des-noms-à-coucher-dehors, ou même marcher sur mes plates-bandes sentimentales : c'est SON DROIT LE PLUS STRICT et JE LE RESPECTE.

N'empêche qu'on avait dit que je devais participer. Alors…

Aujourd'hui, Léandra Courbet va vous parler d'amour et d'amitié, car il fait froid dehors.

(Soyez prévenu : je vais continuer à me la jouer "On connaît la chanson", mais je vous épargne celle-là... Nan mais cliquez pas : ça fait mal aux oreilles !).

Il serait plus juste (et moins pénible) de fredonner :

Je voudrais vous parler des hommes que j'aime.
Ceux qui m'ont embrassée, au bord de la Seine.


(Précision : les hommes que j'aime ne m'ont pas embrassée - sauf un, et ce n'était pas au bord de la Seine).
(Deuxième précision : cette chanson parle d'homosexualité, mais ça ne signifie pas pour autant que les hommes que j'aime sont gays - sauf un, et encore un demi, et je ne parlerai pas de lui aujourd'hui).

Quand je parle de mes meilleurs amis, je dis toujours, de façon un peu théâtrale : les Hommes de Ma Vie.

Ils se comptent sur les trois doigts et demi d'une main.

Chiche que je vous les présente ? Allez, j'ai même une photo !
(Hamilton vous parlera peut-être un jour de cette BD de Blain, Gus. Moi, je fais la maligne et la pirate en publiant cette image, mais je ne l'ai pas encore lue - je vais le faire, promis).

Ce sont eux, à peu de choses près... Y a juste un truc où le dessinateur s'est planté : les cheveux. Il a inversé. En vrai, le type viril qui commande une bière est blond châtain et celui, avachi et blasé, qui roule à la tequila, est roux. Pour le reste, c'est eux tout crachés.

En premier : Hamilton.

Il est comme ma famille, mais en mille fois mieux.

Je suis chez lui chez moi (j'ai les clés de sa serrure hyper sécurisée de maniaque), il se sert dans mon frigo (de l'Orval) sans demander la permission.
Je suis la marraine de sa fille. Il est le parrain de mes futurs enfants si j'en ai un jour (…).
On se voit tout le temps, presque tous les jours, sans jamais s'en lasser (et pourtant il faut avouer que nous pouvons être très pénibles l'un comme l'autre).

N'en déplaise à son fan club, je ne m'attarderai pas sur Hamilton. En fait, c'est de lui que j'ai le moins envie de parler. D'abord, parce qu'il parle déjà bien assez ici. Mais y a pas que ça...
C'est tellement évident, entre nous, qu'il n'y a rien à ajouter. Ça ne fait pas l'ombre d'un doute : nous vieillirons ensemble (sauf si on meurt avant, ce qui est bien possible vu la vie qu'on mène).

Passons au type du milieu. Le gars du Centre (arf, je me mets à utiliser l'italique à tort et à travers comme Hamilton : je dois faire gaffe…).

Appelons-le Frédéric, parce que c'est un joli prénom.

(Je sais que tu lis ce blog : dis-moi si ce choix te dérange, je modifierai. Mais y a tellement de sa voix dans ta voix, tellement de sa douceur dans ta manière d'être attentif aux gens).

Je connais Frédéric depuis qu'il a deux ans et demi (moi, j'étais une grande : j'avais au moins trois ans et demi). Nous étions en maternelle ensemble, puis en primaire. Sa maison se trouvait juste à côté de notre école en préfabriqué, au milieu des champs. Il était le meilleur ami de mon cousin, avec qui j'ai été comme qui dirait élevée.

De lui à cette époque, je garde le souvenir d'un petit gros timide en costume de mousquetaire à un bal d'enfants.

Et puis…

On s'est perdus de vue, on s'est r'perdus d'vue
On s'est retrouvés, on s'est réchauffés
Puis on s'est séparés

(En vrai, on ne s'est jamais vraiment séparés. On ne s'est jamais vraiment perdus de vue non plus d'ailleurs. Et on s'est encore moins réchauffés - du moins physiquement. En vrai, on a passé notre temps à se retrouver).

On s'est recroisé à l'Université. C'est là que tout a recommencé.

Il étudiait l'Histoire (comme tous les Hommes de Ma Vie). On a même vécu en collocation ensemble pendant deux ans.

J'ai supporté son horrible figurine de moto en plastique sur mon étagère dans le living. Il a côtoyé avec une joie non dissimulée mon hamster névrosé. J'ai bavé sur ses Bacardi Breezer dans le frigo, auxquels il ne fallait surtout pas toucher. Il a posé l'œil sur quelques-unes de mes copines, jusqu'au jour où je lui ai présenté sa future épouse, la sœur de ma meilleure amie de l'époque, lors d'un Réveillon.

On s'appréciait, mais on n'était pas vraiment proches. A ce moment de notre histoire, il n'était pas encore un Homme de Ma Vie.

C'est venu après. Il y a quoi, trois, quatre ans ? Ce sont les épreuves qui nous ont rapprochés. Mais je ne veux pas en parler ici, ça serait trop triste...

Il faut en revanche absolument que je parle de son extraordinaire sens de l'humour, de son talent inné pour le second degré. Même quand il fait le balourd (ce dont il ne se prive pas !), il est fin et talentueux. C'est un type exceptionnel, comme dirait Hamilton (et le grand-père de la pub pour les caramels Werther's Original). Je suis fière de lui quand je le présente à de nouveaux copains en disant : "C'est mon meilleur ami".

Une de ses principales qualités, c'est que je peux compter sur lui à 100% : Frédéric est un homme de confiance. Il a été là pour moi quand j'en avais besoin (et je crois qu'il peut en dire autant de ma part). Ce sont des choses qu'on n'oublie pas…

… Subtile transition pour parler du troisième Homme de Ma Vie.

Appelons-le Pierre (parce qu'il est né un 16 juillet, et qu'il est roux).

La chanson qui me vient à l'esprit en pensant à lui, ça serait plutôt celle-ci, de Bénabar (ça ne va pas lui plaire - il est très susceptible, Pierre - mais c'est tellement drôle que je ne résiste pas, tant pis) :

Tu peux compter sur moi, quand tu veux et où que ce soit
Je serai toujours là pour toi
Tu peux compter sur moi, mais surtout n'oublie pas...
Le week-end ça m'arrange pas, la semaine j' suis pas trop joignable.
Les vacances pourquoi pas, sauf que je coupe mon portable.
Je peux je crois en juin, mais vaut mieux que je vérifie.
Dimanche en huit je fais rien, ah non ! Je serai pas à Paris.
Sinon, à part ça, tu peux compter sur moi.

Disons que Pierre à une vie sociale très chargée. Une vie sociale… où je n'ai pas beaucoup de place. Où NOUS n'avons pas beaucoup de place, Hamilton, Frédéric et moi (alors que ces trois-là étaient tout le temps fourrés ensemble à l'Université).

N'empêche qu'il reste, envers et contre tout (et contre ceux qui se moquent en me disant que je m'illusionne), un Homme de Ma Vie.

Pierre, c'est avant tout "un mec cool". C'est l'aspect de sa personnalité que je préfère, et en même temps, parfois, ça me désespère.

Il fait beaucoup la fête. Il fréquente des gens beaucoup plus jeunes. Surtout des jeunes filles (il a ses périodes Dom Juan - là je ne sais pas trop où il en est)...
En fait, il a du mal à se détacher de sa vie d'étudiant, qui est pourtant bien loin derrière nous. En cela, je ne le comprends pas.

Il y a quelques mois, pour d'obscures raisons, on s'est un peu embrouillé. Je n'ai pas aimé ça du tout. Ça m'a complètement fait paniquer.

Même si je ne le vois pas souvent, j'ai besoin de savoir que son amitié est là quelque part (si possible pas trop loin de moi) pour me sentir tout à fait bien.

C'est le seul Homme de Ma Vie à m'avoir dit "Je t'aime" (le privilège du mec cool : les deux autres sont bien trop pudiques pour ce genre de déclaration). Ça m'a fait un bien fou.

Pierre est drôle, dans son genre pince-sans-rire, blasé (et pas du tout porté sur l'auto-dérision). Je m'amuse toujours bien quand il est là. On ragote, on parle de tout et de rien, du bon vieux temps, de mes amours : je suis à l'aise.

Il est sans doute aussi le type le plus intelligent que je connaisse (et pourtant, je connais Hamilton).

Le seul problème, avec Pierre, c'est qu'il y a trop de gens qui l'aiment...
(J'ai des références musicales de merde : oh oui !).

Aujourd'hui, on se voit très rarement tous les quatre.
Chacun a sa vie (sauf Hamilton et moi, qui avons ce blog).
Moi, je trouve ça dommage, mais tant pis.

Évidemment, je croise d'autres personnes, j'ai d'autres amis. Certains sont très importants pour moi, presque autant que ces trois-là.
Mais "Nous, c'est spécial", comme dirait cette chère Nathalie Pâque (un jour, je parlerai de Bodink, qu'on comprenne un peu mieux mon substrat "musical" désastreux…).

Et un jour, aussi, peut-être, je parlerai de Choupinou.
Mais pas maintenant.
Maintenant, je vais dormir.

Je vous laisse avec Dalida...