mercredi 19 janvier 2011

[HUMEUR] Ce n'est rien


Hier, c'était mon anniversaire.
Cela vaut-il le coup d'écrire sur une date dans un calendrier ?

N'est-il pas déplacé de s'appesantir sur le temps qui coule, alors qu'il y a tellement d'autres choses intéressantes à raconter ?


J'avoue que j'ai quelques scrupules à tenir le rôle qui m'a été donné ici : parler de petites choses personnelles et sentimentales. Surtout après le long et bel article de mon cher Hamilton (qui nous fait toujours découvrir des univers merveilleusement géniaux - mais sombres). Je crains de passer pour une fameuse cigale, en comparaison avec son travail de fourmi…

MAIS c'était mon anniversaire hier. Je suis la reine. Je peux. Alors…
Un lieu commun. "Trente ans, le plus bel âge pour une femme".

On dit ça uniquement parce que c'est le moment où, statistiquement, les femmes deviennent des mères. Je suis peu disposée à penser qu'il y ait une autre explication.

Quel intérêt y a-t-il à voir se raccourcir le temps qui nous sépare de la tombe ? Quel charme peut-on trouver dans des rides aux coins des yeux et de la bouche ? Quel avantage retirer d'un corps qui se fatigue plus vite et se remet moins bien des excès de la veille ?
Aucun : c'est évident. Obvious. Vanzelfsprekend (il s'agit juste d'un clin d'œil, je prends actuellement des cours de langues : "Un si mauvais niveau d'anglais et de néerlandais à ton âge, c'est pathétique", m'a-t-on dit récemment).

N'ayez crainte, je n'ai pas l'intention de faire le coup de la crise de la trentaine ici.

Tout d'abord, c'est largement dépassé. Et puis, je fêtais mes 23 ans hier. Le ciel bleu avait envahi le royaume et les gens s'ébrouaient aux terrasses des cafés, exactement comme je l'avais prophétisé. Alors on s'est saoulés…

Je repense à la chanson de Jacques Brel, celle qui dit que mourir n'est rien. Je repense au poème de Rimbaud, celui qui chante qu'on n'est pas sérieux, car j'ai souvent l'impression d'être à peine sortie de l'adolescence.

(Mes références ne sont pas très originales, ni savantes : un chanteur national, un poète qu'on aime quand on a 17 ans, justement. Contrairement à Hamilton, je ne suis bonne qu'à faire dans le mainstream... et à raconter des histoires).

Une histoire, une histoire ! Allez, une petite. Une historiette.
Une histoire d'anniversaire ? Il y en a tant…

C'était le premier anniversaire de la petite fille de mon cousin. Une charmante gamine, avec des yeux expressifs et un air heureux.

Sur la table : de la tarte, du café (jamais de thé), une bouteille de vin pour douze (on ne boit pas dans la famille, c'est bien connu). Des discussions sur les programmes télé. Et d'innombrables souvenirs d'enfance qui sonnent chaleureusement, mais qui ne m'évoquent jamais rien (je parlerai un jour de ces problèmes de mémoire : ça me tracasse beaucoup - et là je pense à la chanson de Jeanne Moreau).

Je ne sais jamais trop quoi dire dans ces réunions de famille. Mon job est compliqué, j'habite à Bruxelles. Il n'est pas de bon ton de parler des amis, alors que c'est tout ce qui fait ma vie. Il est donc difficile pour moi de trouver des questions à aborder.

Le temps qui passe est un sujet glissant, mais il y avait du verglas ce jour-là, alors j'y ai dérapé…
J'ai demandé : "Quand on a des cheveux blancs, comment ça se passe ? Je veux dire, est-ce que les cheveux blancs poussent blancs, ou est-ce que les cheveux châtains blanchissent ?".

Je n'attendais pas de réponse, encore moins une démonstration. Je voulais juste faire celle qui participe à la conversation.

Ma tante s'est approchée de moi et m'a dit : "Mais tu devrais le savoir. Tu en as déjà, des cheveux blancs, Léandra".

Et pour le prouver, elle me l'a arraché. Devant tout le monde (c'était un peu obscène, en fait). Le seul que j'avais (c'est vrai !). Mais un bien épais. Bien blanc. Je l'ai à peine senti, tellement il s'est cassé facilement. Elle l'a déposé sur la table, entre le sucrier et les tasses de café.

Je n'ai pas aimé ça, du tout (même si j'ai fait semblant de rien).

(De cet anniversaire, j'aurais aussi pu raconter le visage triste de ma mère, quand elle me regardait jouer avec la petite fille de mon cousin. Elle est tellement mignonne, cette enfant... Je fais ça très bien, m'occuper des enfants des autres. Et ce sont peut-être des larmes que j'ai vues dans les yeux de ma maman, qui désespère de devenir grand-mère un jour - je la comprends, mais je ne peux rien y faire).

Quelle tristesse. Je ne l'avais pas vue venir, cette calamité… L'âge. J'étais trop occupée à passer mes nuits avec des anges, ou des démons.

"Mourir, cela n'est rien", dit le chanteur national. Mais vieillir. Oh vieillir.

(Je repense aussi à la chanson de Renaud, sur cet album de trop, que personne n'aime : "Putain de cheveu blanc, putain de cheveu blanc", puis : "Moi qui croyais vivre l'éternel printemps". Il dit en substance que ça n'a pas d'importance. Mais quand même, il en a fait une chanson. Et puis lui, c'est différent : c'est un homme).

Voilà, ce coup, bien que futile, vaut bien une pièce noire. Un peu de poivre pour aller avec le sel de ma future tignasse.
Oh et puis non : demain, je fais une colo. Rouge, je crois.

(Souvenir d'une belle soirée "vinyles" avec Hamilton, cette vidéo).

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